Par une chaude soirée de mai, Blanche Dubois (Anne Kessler) débarque chez sa soeur Stella (Françoise Gillard) au coeur d'un quartier borgne de la Nouvelle-Orléans. Elégamment apprêtée, elle vient de quitter la campagne et la demeure ancestrale, Belle Rêve, et traîne son désespoir entre les hommes et le whisky. Au bord de l'effondrement psychologique, elle se heurte au brutal Stanley Kowalski (Eric Ruf), le mari de Stella et fils d'immigré polonais, qu'elle agace particulièrement tout en suscitant son désir. Car l'irruption de la jeune femme dérange l'ordre habituel de la maison, où Kowalski règne en maître sur sa femme et sa bande de potes. Entre les deux s'engage un duel sans pitié. Son être réduit à de la viande chaude, la fragile Blanche voit sa vie dénudée à la lumière crue, comme la clarté vive de l'ampoule accuse les traits de sa jeunesse passée, et pilonnée jusqu'à l'effondrement final.
véritable poésie du théâtre, libérée du registre réaliste qui était celui des pièces de l'époque. Aussi la mise en scène de Lee Breuer ne remet-elle pas le personnage de Blanche au centre de l'action, comme le font la plupart des lectures de la pièce depuis quelques dizaines d'années. Mais elle modifie aussi en profondeur le jeu de Stanley Kowalski. Là où Marlon Brando incarnait un personnage à la sensualité à la fois intériorisée et épidermique, Eric Ruf libère complètement le personnage, sur un mode histrionnique. Longue chevelure blonde crasseuse, bouffon, vulgaire, le Stanley Kowalski de Lee Breuer n'en est que plus odieux et destructeur. Une interprétation du personnage à l'image de la mise en scène qui est présentée aujourd'hui à la Comédie-Française. 
