Grito pelao est l’un des spectacles les plus beaux, certainement le plus touchant du festival d’Avignon 2018. Le défi de cette femme, Rocio Molina, considérée comme l’une des meilleures bailaoras du monde, est de danser la maternité. Pour monter ce spectacle unique, elle s’allie à la chanteuse Silvia Perez Cruz : deux femmes, ces deux mères, fortes et complices, écrivent et inventent un spectacle juste, émouvant qui raconte si bien la joie, mais aussi les peurs de ce moment si singulier.
C’est une histoire de femmes : celle de Rocio Molina, celle de sa mère qui participe au spectacle mais aussi celle de la musicienne et chanteuse Silvia Perez Cruz. Rocio Molina y raconte l’histoire de son propre devenir mère, projet de vie intime qu’elle a transformé en une performance éphémère et unique. Nous saurons tout de son parcours, de celui de ces femmes présentes sur scène. Ces histoires sont dansées et chantées. Les musiciens, seule présence masculine sur scène, s’éclipsent et paraissent accessoires, comme pour accompagner discrètement la poésie bouleversante de ces vies de femmes qui nous sont contées. Au-delà de la maternité, c’est la condition féminine qui s’écrit et se chante, donnant une ampleur toute particulière à ce spectacle, qui n’est ni chant, ni danse, mais la vie qui s’incarne dans des corps.
Car il est bien question du corps dans ce spectacle. À Avignon, Rocio Molina entre dans son quatrième mois, elle vient d’apprendre le sexe de son bébé. "Entre la première à Avignon et la dernière à Paris, à Chaillot, cet automne, où je serai enceinte de sept mois, ma danse sera de plus en plus terrienne." Le corps de Rocio Molina évolue au rythme de sa grossesse, ainsi que sa danse, qui s’adapte, découvre de nouvelles contraintes. Ce génie du flamenco repousse continuellement les limites de son art et propose un spectacle qui ne pourra exister que le temps de cette grossesse.