L'inspiration occitane Un essai de Simone Weil Editions de l'éclat/éclats
– En deux mots
À quelques mois d’écart de la parution des actes du Xe congrès de l’AIEO (Association Internationale d’Études Occitanes), un petit livre édité en janvier dernier n’a de cesse de faire parler de lui. Il s’agit de L’inspiration occitane, qui fait (re)découvrir deux textes de Simone Weil datant de 1941-42 : "L’agonie d’une civilisation vue à travers un poème épique" et"En quoi consiste l’inspiration occitanienne ?".
C’est lors de son séjour à Marseille, en 1940, que Simone Weil découvre la Chanson de la croisade contre les Albigeois ainsi que la richesse de la pensée cathare sous-jacente. Chez la philosophe, le catharisme fournit, dans une Europe bouleversée par la deuxième guerre mondiale, un véritable "modèle de civilisation". Elle retient notamment de celui-ci trois leçons : le refus de la force dans le processus de négociation des droits et des devoirs de chacun ; le rejet d’une quelconque hiérarchie institutionnelle cherchant à déresponsabiliser l’individu ; un rapport au divin pouvant s’exprimer par le biais d’une célébration courtoise de l’amour interdit, et pourtant étranger à toute sorte de codification métaphysique.
Voulant souligner la valeur à la fois poétique et documentaire de la Chanson, Simone Weil s’adonne à une analyse qui dépasse le cadre du simple commentaire, pour faire de cette source un prétexte grâce auquel dénoncer les paradoxes de l’époque contemporaine : s’il est difficile de croire, souligne-t-elle, qu’une collectivité entière, bien qu’hétérogène, puisse encourager l’anéantissement d’une pensée en marge de toute doxa officielle (et, par là, possiblement révolutionnaire), ce n’est pas pour autant que nous sommes en droit de relativiser le fondement d’un tel danger.
Au fond, c’est également ce que la préface de Claude Le Manchec laisse entendre à l’heure où les Éditions de l’éclat/éclats ont choisi de redonner de la visibilité à un travail quelque peu tombé dans l’oubli, à l’instar du message dont il se fait réceptacle.