L'AUTOMNE EST ARRIVE ET AVEC LUI, la bise et la bruine, de quoi nous donner envie de nous installer confortablement sous un plaid et de découvrir les nouveautés de ces dernières semaines en littérature jeunesse - chez les Editions Kimane, Didier Jeunesse et Saltimbanque - pour une plongée au coeur de l'amitié, des premières aventures, de l'imaginaire mais surtout de se laisser surprendre à rêver de Noël.
Court et efficace, jouant sur des illustrations épurées, géométriques, simples mais pour autant expressives, L’Amour est un album qui permet d’aborder le concept avec tendresse et humour. La narration aborde plusieurs points de vue et se structure comme une comptine, de manière répétitive : « Pour mon amie Lola, l’amour…. », « Pour maman, c’est…. », « Pour mon cousin Hugo : c'est…», « Pour Papi :… ». Huit personnages – y compris le chien de la famille – et autant de réponses spontanées et parfois cocasses à la question : c’est quoi l’amour ? Huit regards différents, huit réponses faites à une petite fille en quête d’explications pour, à la fin, se faire sa propre idée sur la question. Un texte succinct donc, mais juste, précis, où chaque proposition fait sens, sans jugement, et résonne en chacun.
Frédégonde, la perce-siècle nous fait découvrir Frédégonde, dont la naissance a lieu « il y a à peu près mille ans ». Devenue une enfant dynamique et intrépide, elle préfère troquer sa poupée de chiffon pour les épées de bois et un tambour, sur lequel elle frappe et prononce des mots magiques qui lui permettent de changer de siècle. Son leitmotiv, voyager à travers le temps et l’Histoire dès que l’envie lui en prend ou qu’elle court un danger ; mais surtout, s’habiller comme elle l’entend. Du Moyen Âge aux années folles, en passant par la cour du Roi d’Espagne et la Révolution française, Frédégonde se moque de la mode du temps et des conventions. D’époques en époques, elle finit par grandir, voire s’émanciper, aux côtés de femmes plus modernes enfin libres de leurs mouvements grâce à leurs vêtements et aux métiers auxquels elles peuvent accéder. Cet album au ton décalé – renforcé par le mélange de techniques de l’illustratrice qui associe collage, peinture, et dessin – est l’occasion pour le lecteur de découvrir l’histoire de la mode et des mœurs des époques, au gré des facéties de l’héroïne.
– Contes hivernaux
Au pied du chêne commence par la chute d’un gland. Aussitôt, un écureuil se précipite pour l’attraper mais voilà, il est si craintif qu’il n’ose se lancer dans cette forêt bien habitée où se succèdent « serpent », « blaireau », « renard », « cerf », ou encore « oiseau ». Notre pauvre protagoniste avance, puis recule, regrettant les multiples occasions manquées, mais son inquiétude est trop grande. L’album associe un contenu narratif extrêmement simple et un foisonnement de détails visuels, permettant au lecteur d’observer de petites histoires enchâssées dans la trame principale. Le lecteur se laisse prendre à ce conte raconté selon un point de vue interne, où les illustrations elles-mêmes, par un jeu de cadrage, de gros plans et d’hors-champ, participent de la création du suspens : parviendra-t-il à récupérer son gland ? Tout vient à point à qui sait attendre…
Je déteste l’hiver met en scène Panache et Pompon, deux petits écureuils – un roux et un gris – qui sont les meilleurs amis du monde et passent tout leur temps ensemble pendant les longues journées d’été. Mais un beau matin, une feuille morte se détache d’un arbre et tombe à leurs pieds. Si ce menu événement déclenche chez Pompom une vive émotion de joie tant il se réjouit de voir arriver l’hiver, Panache, lui, exprime son désarroi. Dans une mise en page très rythmée, qui fait écho à l’esthétique de la BD avec la présence de bulles, d’onomatopées, chacun des deux imagine alors les « mois froiiiids qui vont arriver » : Pompon adore l’hiver, la neige, se blottir au coin du feu avec un livre, et le réconfort d’une boisson chaude. Panache, lui, craint le froid, les jours qui se raccourcissent. L’opposition qui se cristallise entre les deux amis est renforcée par une mise en page qui dissocie leurs deux points de vue, le tout étant accentué par les jeux et les contrastes de couleurs : l’écureuil roux se roule dans les feuilles d’automne et vit l’hiver comme une période chaleureuse, tandis que l’écureuil gris clair qui ne jure que par le froid est davantage enveloppé par des couleurs blafardes. Le travail typographique témoigne également des émotions des personnages, par l’utilisation de caractères gras, ou le triplement de lettres qui insistent sur l’angoisse que suscitent « les trèèès longues nuits noires » chez Panache. Peu à peu, l’hiver finit par séparer les deux amis, qui se manquent l’un l’autre. Il s’agira alors pour eux d’accueillir le point de vue des autres et l’importance de faire des compromis.
« Il était une fois, à Noël, une petite chouette, qui vivait seule, toute seule, au milieu d’une forêt profonde, sombre et brumeuse ». Ainsi commence ce nouveau conte qui nous plonge dans la féérie de Noël : Il était une fois la chouette de Noël. Cette petite chouette, de nature très anxieuse, vit donc en haut d’un grand sapin, lorsqu’un matin particulièrement glacial, un bruit retentit dans la forêt. L’étonnement de la chouette se double de celui du lecteur, dont le regard est dérouté par la mise en page. On comprend alors que le sapin se fait abattre et la chute de ce dernier est rendue par sa chute dans la page, nous permettant d’autant plus de nous identifier à la chouette et de vivre cette chute avec elle. Le lecteur doit alors tourner le livre – dont le format présente l’originalité d’être très allongé : 21,6 x 38 cm – et alterner entre horizontalité et verticalité en fonction de ce qui arrive à la chouette, accrochée à son sapin. La voilà alors partie pour un voyage inattendu, brusquement transportée dans un nouvel endroit où tout scintille, clignote. Déracinée et désorientée, elle fait l’expérience de la lumière artificielle, du bruit, de l’agitation et du mouvement. Mais où est-elle ? La disposition du texte sur les pages, pleinement intégré aux illustrations en pleine page, permet également de jouer sur la multiplicité des discours : onomatopées, réactions des humains, narration et discours indirect libre qui nous plonge dans le point de vue de la chouette. Inspiré de l’histoire vraie de la chouette Rocky, trouvée dans le sapin du Rockefeller Center de New York, ce conte met en scène le voyage initiatique de l’attachante petite chouette, rempli de surprises, et dont elle reviendra nécessairement changée.