Invisibles, de Nasser Djemaï
Théâtre 13, Paris
Jusqu'au 20 octobre 2013
– En deux mots
Ils sont quatre à n’être rien ou presque pour le monde qu’ils observent depuis leurs chaises. Quatre dont le cœur est au bled mais la vie de l’autre côté de la Méditerranée, dans un foyer décrépit où ils s’accrochent à la promesse de leur retraite, au souvenir de leurs familles et aux causeries autour du jeu de dominos. L’avenant, le rêveur, l’élégant et le méfiant : quatre de ces milliers de travailleurs immigrés que la France a fait venir sur ses chantiers et qui demeurent aujourd’hui loin de l’Algérie, à partager les soucis du quotidien et la nostalgie d’un temps qui n’est plus ou d’un pays qui n’est pas. Le cinquième, lui, est encore ailleurs. Immobile et muet sur un fauteuil autour duquel ses amis chibanis - "cheveux blanc" en arabe - s’empressent, il symbolise à lui seul l’oubli et l’impuissance dans lesquels sont tombés ces bras des trente glorieuses. Pourtant c’est pour lui, El Hadj, qu’un jeune homme débarque un beau matin un coffret à la main et des questions plein la tête.
Le jeune homme, c’est Martin. Il n’a jamais connu son père et sa mère vient de mourir, lui laissant pour seul adieu l’adresse des cinq vieillards, les noms d’El Hadj et du docteur Raphaël ainsi que le mystérieux coffret. Pressé d’en finir et d’en découdre aussi, Martin se rend immédiatement sur place, sans compter bien sûr sur le mutisme d’El Hadj, le parfum de secret qui flotte dans l’air et l’histoire bouleversante de ces vieux maghrébins déracinés. En quelques instants la rencontre a lieu et le jeune homme comme le spectateur se voient transportés dans le quotidien de ces anciens travailleurs invisibles que tous, l’Etat français comme la famille demeurée au bled, semble avoir rejetés. Entre rêves de retrouvailles, souvenirs nostalgiques et commentaires piquants sur le théâtre d’une rue qu’ils ne cessent de contempler, les langues des chibanis se délient en un témoignage aussi poignant que drôle.
Invisibles
Ecrit et mis en scène par Nasser Djemaï
Avec : David Arribe, Angelo Aybar, Azzedine Bouayad, Aziz Kabouche,
Kader Kada et Lounès Tazaïrt.
Théâtre 13 / Jardins
103 A boulevard Auguste Blanqui
75013 Paris
Durée : 1h40
Mar, Jeu & Sam 19h30 / Mer & Sam 20h30 / Dim 15h30
Plein Tarif : 26€ / Tarifs réduits : 16€, 13€, 12€, 11€, 10€, 6€