Volpone ou le renard
Une pièce de Ben Jonson
Mise en scène de Nicolas Briançon
Actuellement au Théâtre de la Madeleine, à Paris
– En deux mots
Volpone - célibataire riche sans héritier naturel - feint cyniquement d’être à l’article de la mort, ce qui a pour but d’attirer les prétendants à la succession. Le serviteur Mosca fait saliver l’avocat Voltore, le vieux gentilhomme Corbaccio, le jeune marchand Corvino devant la perspective de l’héritage. Corvino va jusqu’à offrir sa femme, Corbaccio déshérite son fils. Mais l’escroquerie ne demeurera pas impunie…
Nicolas Briançon, derrière et sur scène, orchestre avec brio ce théâtre de faux-semblants où les masques se portent et s'enlèvent en permanence. À rebours de l'adaptation comique et exhubérante au Théâtre du Ranelagh plus tôt cette année (voir ici), celui qui prête ses traits au serviteur exploite ici toute la noirceur et la férocité du texte de Ben Johnson, au service d'une mise en scène dont chaque geste, chaque regard, chaque syllabe s'organise comme dans un mécanisme d'horloger. Fable sur l'argent - son pouvoir, sa fascination, son pathétique -, ce Volpone séduit par l'équilibre entre le respect du caractère surrané des dialogues du XVIIe siècle et la modernité du jeu des comédiens. Au premier rang de ces derniers : Roland Bertin, sublime anti-héros éponyme dont le corps, la respiration, l'articulation même donnent au personnage toute sa chair triste. C'est son jeu et la réplique que lui donne Briançon qui font que la farce cruelle se mue bientôt en tragédie. Plus la fin approche, plus les pièces d'or brillent comme des flammes, donnant à ce décor de coffre-fort des allures de purgatoire dont personne ne peut s'échapper.
