Une sorte d'Alaska
Théâtre Les Déchargeurs, Paris
Jusqu'au 16 décembre 2013
– En deux mots
Au moment où le public pénètre la petite salle du théâtre des Déchargeurs, ils sont déjà là, immobiles, sur la scène. Elle, c’est Déborah, elle est allongée dans un lit, elle ne bouge pas. Lui, c’est le docteur Hornby ; assis sur une simple chaise de bois, il veille, hiératique, au chevet de sa patiente. L’obscurité se fait dans la salle, le silence gagne les rangs des spectateurs, mais sur scène rien ne bouge. Nous attendons tous et, pendant quelques minutes, chacun vit un peu des seize ans d’un calvaire qui doit s’achever bientôt.
Ce calvaire, c’est celui de Déborah, une jeune femme tombée dans un mystérieux coma l’année de ses quinze ans. Maintenant elle a 31 ans et, grâce à une injection que le docteur lui a faite, elle doit se réveiller. Se réveiller, certes, mais pour qui, pour quoi ? Alors qu’elle a enfin ouvert les yeux et que le médecin lui présente sa situation, Déborah ne reconnaît ni ne comprend rien. Elle est encore enfant dans son esprit. Elle s’informe du mariage de sa sœur, elle réclame les baisers de sa mère, mais elle se sent étrangère à ce corps de femme qui est désormais le sien et ne veut ni de cette Pauline qui a "pris un nombre d’année substantiel" et qui prétend être sa sœur, ni de ce monde que sa mère a quitté. Face à ce gouffre de seize ans qui sépare sa réalité de celle de tout son entourage, Déborah, dont le rôle est magnifiquement tenu par Dorothée Deblaton, lutte pour se sortir de cette région inconnue que forment ses années de léthargie. Avec Une sorte d’Alaska, dont le texte est d’une grande subtilité, Harold Pinter nous donne à voir un combat bouleversant que la sobriété de la mise en scène d’Ulysse di Gregorio rend avec justesse.
Une sorte d'Alaska
Une pièce d'Harold Pinter
Mise en scène d'Ulysse di Gregorio
Avec : Dorothée Deblaton, Grégoire Pallardy, Marinelly Vaslon
Durée : 1h20
Théâtre Les Déchargeurs
3 Rue des Déchargeurs 75001 Paris
Tous les lundis 21h30
Tarifs : de 10 à 24 €