
l'Afrique, l'un de ces petits supports n'est autre que le modèle ayant servi pour le logo du musée. La sculpture Teke, de la République Démocratique du Congo, représente une silhouette anthropomorphe qui, de la tête et de ses bras, soutient un plateau incurvé destiné à recevoir la tête du dormeur. Le dessinateur s'empare de la forme et l'objet élégant, mais avant tout fonctionnel, devient un curieux idéogramme sur des prospectus colorés.
CETTE FORCE DU DESIGN africain est aussi sa faiblesse. La comparaison par Joëlle Busca entre le tabouret riigu, fabriqué à partir de barils métalliques, et le Tam Tam Stool (2002) de l'architecte et designer italien Matteo Thun, marque bien ce décalage. Le premier est une pièce unique tandis que le second – tout en s'inspirant des mêmes formes – peut être produit à la chaîne. Il est clair que, contrairement à leurs confrères européens, les designers africains ne font pas le poids face aux salons de jardin en plastique chinois. Les raisons de cette situation sont facilement identifiables et les perspectives inquiétantes. Ils doivent composer avec des "marchés locaux au pouvoir d'achat très faible, une industrie clairsemée, un déficit important de circulation et de moyens de communication, une très forte présence de produits venus d'Asie [...]".
ou d'Asie. Même si les mentalités évoluent – le Conservatoire des arts et métiers multimédia Balla FassekeKouyaté à Bamako développe le projet d'une section design – le chemin à parcourir est encore long. Dans sa maison qui domine le Djoué, affluent qui rejoint le fleuve Congo à quelques kilomètres de Brazzaville, Patrice possédait également une collection de statuettes. Leur sort est à l'image du décalage entre deux perceptions, l'une esthétique et l'autre magique, au sein du même pays. Bien que ces "fétiches" aient une grande valeur marchande, les pillards ne les ont pas emportés : ils ont préféré les décapiter pour neutraliser leur pouvoir sorcier. Restent des têtes et des corps étendus sur le sol.


