L'exposition A l'origine, qui ouvre ce 17 septembre à la maison d'art contemporain The box in Paris, présente trois réflexions d'artistes sur leurs racines. Karine Pelgrims, plasticienne, photographe et vidéaste, est partie découvrir son passé au Maroc et l'a reconstitué... à la lumière d'un fait divers.
Karine Pelgrims est née à Casablanca l'année de la naissance de l'Europe. Son père, né en 1902, était Belge et aventurier aussi. L'Afrique, surtout, de 1929 à 1960. Il signa la fin de sa liberté avec son retour définitif en France, et n'a eu de cesse de parler de l'Afrique à sa fille: de quoi, pour Karine Pelgrims, s'imaginer un Maroc familial, et sans nostalgie aucune, mais avec une bonne dose de curiosité, s'en retourner au pays en 2005. En guise d'itinéraire, elle recherche sa maison casablancaise, sa cathédrale de baptême... Et en guise de surprise, elle suit au jour le jour un fait divers qui déchaîne la presse, alimente fiévreusement les conversations des Marocains : des morceaux de femmes découpées ont été retrouvés dans un quartier populaire. L'affaire s'est passée en trois temps. 1/des membres ont été retrouvés dans une poubelle ; 2/une tête est découverte ; 3/le présumé assassin est arrêté puis passe très vite aux aveux. Rebondissement : ce n'est pas une femme qui a été tuée, mais deux ! Aujourd'hui l'homme croupit au fond d'une prison, à vie.
Lors de son séjour casablancais, Pelgrims se passionne parallèlement pour cette histoire toute contemporaine et sa (re)connaissance de sa terre natale. Un an après son périple marocain, en 2006, elle accède à la totalité des documents 
familiaux, des photos, des courriers, des papiers administratifs... Et retourne une nouvelle fois, en 2007 au Maroc. En rentrant en France, c'est le déclic. Elle s'accapare ce matériau familial et le mêle aux images de son Maroc des années 2005-2007 :
Maroc aller / retour prend forme.
Au menu, une série de photographies sur sa rencontre avec le Maroc, des plans-séquence, un film sur sa passion pour l'horrible fait divers, "Le Boucher de Menala", un album photos... Son père aussi faisait des albums. Tout est là, du noir et blanc, des couleurs, tout son ressenti. Des photos d'un autre siècle, de l'argentique, du numérique du XXIe siècle marocain, tout l'univers enfantin de la plasticienne aussi. Tous les éléments mis en place communiquent entre eux. Des morceaux de femmes découpés et la fabrication d'une histoire personnelle en mode puzzle, c'est gros comme un immeuble boulevard d'Anfa (Pelgrims a fait ses premiers pas sur ce boulevard, qui est à Casa ce que les Champs Elysées sont à Paris). Et elle nous promène ainsi dans un va-et-vient identitaire, nous invite à jouer et à reconstituer les morceaux de son univers découpé et recomposable à l'envie.
Maroc aller / retour fait aussi penser au voyage d'un dromadaire solitaire croisé en plein désert. Jamais nous ne saurons où il va. Va-t-il rejoindre son troupeau ? A-t-il une mission à remplir confiée par son chamelier ? Fonce-t-il vers un point d'eau ? Il sait où il va et ne nous le dira pas. A nous de le deviner ! A nous de nous laisser embarquer dans un périple, de nous laisser balader à notre guise, de nous confronter à notre propre espace intime de souvenirs du passé et à venir, de nous laisser toucher.
Maroc aller / retour, voyage de famille
