Arthur l'enchanteur
Pour chaque chevalier du royaume, l'heure est venue de saisir épée et bouclier et de grimper sur son destrier afin de venir présenter ses hommages au seigneur de Camelot. Le bien aimé roi Arthur a établi son camp jusqu'au 24 janvier à la Bibliothèque nationale de France, pour la première exposition à lui être consacrée en France.
Au détour d'un couloir se trouve l'entrée d'une forêt merveilleuse. Un dernier regard posé, à travers la vitre, sur les arbres du jardin central de la BNF, avant de plonger dans les salles plus obscures de La Légende du Roi Arthur, sous les branches des arbres de Brocéliande... Du jeune et naïf Arthur du dessin animé de Walt Disney au souverain cynique de Kaamelott, en passant par celui du long métrage Excalibur de John Boorman, les avatars du roi légendaire s'affichent sur l'écran qui ouvre l'exposition. Partant de ces oeuvres qui ont exploité l'imaginaire arthurien, il s'agit de revenir à la littérature, à l'origine de ces légendes, à travers cent-quarante pièces, dont une centaine de manuscrits médiévaux. "Pour la première fois, nous réunissons des manuscrits de toute l'Europe, qui montrent bien l'importance de la diffusion de la légende d'Arthur à partir du noyau français", explique le commissaire de l'exposition, Thierry Delcourt, directeur des manuscrits à la BnF.
Dans un univers bleu nuit, la scénographie immersive et stylisée, faite d'étendards en guise de panneaux explicatifs et de tables rondes en lieu de chevalets, invite au rêve et à l'imaginaire. La légende du Roi Arthur est avant tout l'occasion de raconter à nouveau ces histoires épiques, venues des temps anciens, faites d'amour et de mort, de trahisons, de guerres, de magie et de sorcellerie. L'exposition se veut "narrative, essentiellement", poursuit le commissaire. Aussi, des voix, disséminées dans le parcours, s'élèvent pour faire entendre ces récits, comme cet enregistrement d'une lecture du Merlin de Robert de Boron. Issues de traditions orales, ce que l'on appelle la matière de Bretagne, la légende arthurienne connait diverses versions, chaque texte apportant de nouveaux 
éléments, en modifiant d'autres. Les plus connus sont attribués à Chrétien de Troyes au XIIe siècle comme Le Conte du Graal ou Le Chevalier à la Charette. La version qui est retenue ici provient d'une série de textes du XIIIe siècle connus sous le nom de cycle du Lancelot-Graal.
Le parcours est sinueux, à l'image des textes médiévaux labyrinthiques. Les étendards translucides sur lesquels se devinent les photographies d'arbres d'Alain Cornu structurent ainsi l'espace et proposent l'itinéraire mystérieux d'une quête dans les méandres de cette forêt de manuscrits. Car même si ces enluminures s'imposent au regard avec l'évidence esthétique, le manuscrit médiéval n'est pas un objet facile à appréhender. Il est ouvert à une page que le profane ne pourra pas lire et dont le texte, malheureusement, n'est pas retranscrit, même si le cartel fournit les éléments principaux du passage. Pourtant, il reste un objet d'art et d'histoire à contempler. Les motifs floraux, la précision et la vivacité des couleurs dans la représentation de personnages ou de lieux ainsi que la calligraphie fascinante font de ces manuscrits un point de départ saisissant pour l'imagination. A côté de divers objets qui représentent des épisodes de la légende arthurienne, boîte d'horloge ou médaillons, les manuscrits sont les véritables héros de l'exposition, et ce sont bien eux qui siègent sur les tables rondes, à l'image des chevaliers d'Arthur.
L'exposition est surtout un voyage dans la légende, entre réel et imaginaire. Arthur, pense-t-on, aurait peut-être pour origine un personnage historique qui aurait vécu en Angleterre au VIe siècle. Sur ce personnage se fondent dès le VIIe siècle des légendes au coeur de ce que l'on nomme la matiè
re de Bretagne. Cinq siècles plus tard, Arthur est devenu le roi que l'on connait. Dans ces oeuvres s'instaurent le lien entre le fils d'Uther Pendragon et le Graal, cette coupe sacrée dans laquelle Joseph d'Arimathie aurait recueilli le sang du Christ, christianisant ainsi la légende. Si les épisodes de la vie d'Arthur se donnent à voir les uns après les autres, l'exposition convoque aussi les autres personnages principaux des oeuvres : l'étrange Merlin, fils du diable, personnage ambigu, aux pouvoirs impressionants ; Lancelot, le chevalier parfait qui succombera pourtant au péché avec Guenièvre ; la femme d'Arthur ; ou encore Galaad, son fils, jeune homme pur et chaste qui sera destiné pour cette raison à retrouver le Graal.
De ces sources médiévales, de très nombreux artistes se sont inspirés en littérature, mais aussi en peinture et en musique : des peintres pre-raphaélites à Apollinaire, en passant par J.R.R. Tolkien, Eric Rohmer ou les Monty Pythons, la légende et ses suites multiples se découvrent au fil des espaces de l'exposition. Tandis que des airs de Richard Wagner, Jean-Louis Murat et Roxy Music retentissent au-dessus de l'épée d'Excalibur, qui trône au milieu de la salle, aussi mystérieuse que majestueuse.
La légende du roi Arthur, jusqu'au 24 janvier 2010
BnF, site François Mitterrand
Quai François Mauriac
75013 Paris
Tlj (sf lundi) 10h-19h
Dim 13h-19h
Tarif plein 7€
Tarif réduit 5€
Rens. : 01 53 79 49 49
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Légendes et Crédits photographiques:
Vignette page d'accueil: Geoffroy de Monmouth, Historia regum Britanniae. Première représentation d'Arthur. France, abbaye du Mont-Saint-Michel, milieu du XIIème siècle. BnF, département des Manuscrits.
1 Lancelot-Graal. Christ en croix (anges recueillant son sang dans des calices), la fille du roi Pellès, Galaad présenté à Lancelot. Centre de la France, vers 1475. Provenance Jacques d'Armagnac. BnF, département des Manuscrits
2 Lancelot-Graal (Lancelot, Queste, Mort Artu). Prouesses de Lancelot (Le pont de l'épée, combat des trois lions et combat contre Méléagant). Tournai, 1345. Provenance: Louis de Bruges. BnF, département des Manuscrits.
3 Queste du Graal. Post-vulgate. Galaad vainqueur de Lancelot et Perceval. Milan, vers 1380-1385. BnF, département des Manuscrits.
4 La table ronde en honneur triumphante, issue des Chants royaux de l'Immaculée Conception de Notre-Dame de Rouen. Paris, vers 1530, BnF, département des manuscrits
