voir de que loin, sur la place Farnèse. Surtout le soir, lorsque le bureau vide reste illuminé, laissant entrevoir un peu des merveilles du palais. Il faut sinon se contenter de sa façade, entre grandeur et sobriété, et des deux fontaines de marbre monumentales provenant de fouilles effectuées dans les thermes de Caracalla. L'exposition Palais Farnese, de la Renaissance à l'Ambassade de France permet au contraire d'approcher - uniquement le week-end pour cette pièce - le travail du maniériste Francesco Salviati (1510-1563), complétée par les frères Taddeo (1529-1566) et Federico Zuccari (1502-1649), qui raconte l'histoire des Farnèse telle qu'ils voulaient qu'elle soit contée, c'est-à-dire marquée du sceau de la gloire et de la puissance, comme en témoigne la représentation en apothéose du pape Paul III, né Alexandre Farnèse, à l'origine du somptueux palais dont il a jeté les fondations en 1514, ici représenté assis entre les allégories de la Paix et la Prospérité. La scène du concile de Trente, l'une des initiatives les plus marquantes de Paul III durant son pontificat, s'inscrit dans le même projet, alliant politique et splendeur, tout comme celle de la paix de Nice conclue en 1538 entre François Ier et Charles Quint ou la représentation de la victoire des Farnèse sur les Pisans. Le plafond de bois richement sculpté, le plus ancien de tout le monument, et la gracieuse loggia dessinée par Michel-Ange viennent compléter l'ensemble. Au visiteur d'imaginer les représentants illustres de l'une des familles les plus puissantes d'Italie évoluant dans ce qui était autrefois leur salon d'apparat.
imaginaire dans le passé, habituellement impossible du fait de locaux fermés le plus souvent au public. Cette fois, libre à chacun d'admirer la façade de la cour principale intérieure où alternent frontons triangulaires et frontons semi-circulaires révélant ainsi la présence de Michel-Ange. De même, court au deuxième étage une frise de masquerons et de feuillages, typique de l'artiste. L'écho de la splendeur passée point également à travers les nombreuses reconstitutions virtuelles des statues qui ornaient autrefois ce cortile interne, en particulier l'imposant Hercule Farnèse (dont le palais présente par ailleurs une copie en plâtre), et la présence d'une statue originale, celle d'un Apollon assis en porphyre. Les lys des Farnèse - annonce quasi prophétique du destin français réservé au palais - ornent les murs. Les vastes salles, les larges escaliers, les hauts plafonds de bois témoignent du cadre de vie quotidien d'une des plus puissantes familles d'Italie. Puccini ne s'y est pas trompé, lui qui place le deuxième acte de la Tosca en 1900 dans le Palais. Et les Français non plus, bien sûr, qui ont fait de la demeure le siège des ambassadeurs du roi dès Louis XIV, avant d'établir une convention avec l'Italie en 1936, qui leur assure dès lors le logis en ces somptueux lieux pour un loyer symbolique, tandis que les Italiens bénéficient en échange de l'Hôtel de la Rouchefoucauld-Doudeauville à Paris pour leur propre ambassade.
l'inspiration pour créer la Galerie des Glaces à Versailles. Et le jardin lui-même, derrière, la villa, participe de cette découverte d'un palais habituellement secret offrant, pour quelques mois, la contemplation de ses beautés : les orangers, les palmiers, les citronniers et les magnolias, au milieu desquels poussent quelques cyclamens blancs, créent un espace d'harmonie naturelle, tandis qu'au loin s'élèvent quelques façades ocres de palais romains.
L'ORIGINAL, IMMENSE, est resté à Naples, où toute la collection familiale a atterri par le jeu des mariages et des héritages. Mais certains témoins des prestiges passés sont, eux, bien présents : en particulier une Vénus callypige, littéralement "aux belles fesses", qui remonte son péplos pour admirer son postérieur, et un Atlas qui soutient avec effort le globe terrestre sur ses épaules. De la même façon, de nombreuses monnaies anciennes et des camées précieux rappellent que les collections antiques des Farnèse s'étendent à tous les domaines possibles. Meubles travaillés de façon minutieuse, toiles de maîtres, en particulier les huiles sur toile d'Annibal Carrache (Le Christ et la Cananée, 1595), du Greco (Portrait de Giulio Clovio, 1570) ou du Titien (Portrait de Settimia Jacovacci, entre 1545 et 1546), reproductions de tableaux célèbres, comme la copie du Jugement universel de Michel-Ange, réalisée par Marcello Venusti (1549), qui témoigne à la fois du retentissement de la célèbre fresque de la chapelle Sixtine et des deniers la famille capable de se l'offrir… Chaque objet rappelle la grandeur des Farnèse.
