De même que le bâtiment de style néorenaissance qui abrite la salle d’exposition consacrée aux arts plastiques contemporains rappelle l’architecture d’une basilique chrétienne, l’exposition de Markus Schinwald, artiste autrichien né à Salzbourg en 1973, revisite un autre culte fondamental, celui du corps humain. Dans les nefs du Kunsthalle budapestois, les corps qui communiquent et vivent leur vie, placés dans un univers halluciné, sont bouleversés par des transformations et par une dégénération dont Schinwald est le metteur en scène.
Dans la première salle, seule une marionette assise, Hans, nous accueille. Elle est en train d’avaler une bande de papier sur laquelle est écrit "
NEVER". L’homme, comme perpetuum mobile, constitue la porte d’entrée d’une exposition dont la structure a des allures théâtrales. Derrière Hans, Schinwald modifie l’espace géant de la salle : sur l’axe principal, il place un mur qui clôt quelques passages entre les salles. Le mur installé sert aussi à présenter les œuvres de l’exposition. Cette "ligne” d’objets d’art ressemble à une collection de souvenirs personnels ou aux "Wunderkammer", les cabinets de curiosités du XIXe siècle.
Les trésors à la fois quotidiens et étranges que l'exposition recèle sont autant des portraits d'apparence réalistes, des fragments de meubles découpés, des chaussures difformes, une chemise encadrée, des photos montrant des personnes dans des postures tordues et des rideaux rouges de théâtre. Mais à y regarder de plus près, tout ce qui a l’air ordinaire au premier abord est en réalité détourné de sa fonction originelle, loin de l’ordre habituel des choses. Les individus sur les portraits portent des marques sur la peau, certaines parties de leur corps sont couvertes ou extrêmement agrandies. Ainsi, les petits bourgeois représentés deviennent des êtres surréels, cauchemardesques, un peu à la manière d'un Magritte. La technique de Schinwald s’inscrit bien dans cette démarche : l'artiste peint et grave des éléments non-conventionnels sur des tableaux anciens, classiques.
Puis, par l’intermédiaire d’une armoire, on traverse le mur des installations pour continuer de l’autre côté la promenade, qui prend des atours terrifiants. Ainsi, en passant dans les nefs secondaires de l’immeuble, on peut trouver d’autres installations (
Bycycle, Adornorama) et regarder des créations vidéo (
Dix amoureux - 2006,
Croisade des enfants - 2004,
Dictio pii - 2001). Chacune est une variation cinématographique sur le thème de l’homme-marionnette.